Reflets sur la mer



O mer, dont l'émeraude épuise les regards…
Tes vifs coursiers d'argent galopent sous l'écume :
Par la houle meurtris, abreuvés d'amertume,
Ils labourent tes flots, frémissants et hagards.

Quand au couchant vermeil un arc-en-ciel s'irise,
J'agrippe mes désirs à ces crinières d'or :
Convoitant le destin du grand Conquistador,
Je chevauche la vague au doux chant de la brise.

J'enlace de mes bras le cou du goéland,
Son vol majestueux gagne une île lointaine ;
J'ai le cœur généreux du vaillant capitaine,
Et la témérité d'un corsaire insolent…

L'imagination à l'humeur vagabonde
Sur la plage me pose et se fige soudain.
Je voile de mes pleurs l'avenir incertain
Pour juguler en moi sa quête moribonde.

La mouette rieuse accable de ses cris
Ce voyage immobile aux vaines tentatives,
Et mes chansons d'espoir ont des voix de captives
Que disperse le vent au gré du sable gris.

Trop lasse de fouler le tranquille rivage,
Pour survoler un jour les abysses béants,
Comme planent au ciel les albatros géants,
Que m'emporte l'essor de leur élan sauvage !

Monique Pierillas 1994