Amour d'Automne



Mon livre s'est ouvert aux pages de l'automne :
Les désirs, frissonnants comme des enfants nus,
S'y pressent en silence et leur regard atone
Effleure, sans les voir, des sentiers trop connus.

J'aurais voulu t'offrir un élan de jeunesse,
Ma gerbe déliée au soleil de l'été...
Mais l'hiver oublieux, avare de largesse,
Etend son voile froid sur ma témérité.

A la brume des nuits j'abandonne ce livre,
Froissé, qu'en reste-t-il sous tes aveugles mains ?
Il se referme seul, fatigué de poursuivre
Sa quête déchirée aux ronciers des chemins.

Le songe a dérivé comme une feuille morte ;
Avant de se dissoudre au flux de l'avenir,
Il se laisse fouler par le vent qui l'emporte
Et j'entends sous nos pas notre rêve mourir.

Près de la source mauve où s’enlacent les veines,
Notre chair s’est meurtrie un peu plus chaque jour.
Pourtant le sang palpite à l’ombre des fontaines
Où ne se tarit point l'eau fraîche de l'amour :

L'heure éblouie exulte : aux pampres de l'aurore,
Affaiblie une plainte égrappe ses instants ;
Le bonheur est un fruit que la pendule ignore
Mais qui fond ses regrets dans la bouche du temps.

Monique  Pierillas